Cette feuille à la plume et encre noire et au lavis gris illustre l'épisode de la rencontre d'Eliézer et de Rébecca, d'après le livre de la Genèse (24, 10-28). Abraham a envoyé son vieux serviteur choisir une épouse pour son fils Isaac en Mésopotamie, dans la ville de son frère Nachor. Arrivé aux portes de la ville, Eliézer fait reposer ses chameaux près d'un puits. Une jeune fille d'une grande beauté, Rébecca, vient puiser de l'eau : à la sollicitation du serviteur, elle lui offre à boire ainsi qu'aux animaux. Eliézer reconnaît à ce signe qu'elle est la promise d'Isaac, et lui remet un anneau d'or et deux bracelets.
La mise en page, d'un grand classicisme, dispose les deux personnages principaux au premier plan, de part et d'autre d'un axe de symétrie vertical. Entre eux, l'accent est mis sur le bijou présenté par Eliézer et sur la cruche aux pieds de Rébecca. La jeune femme adopte une attitude de réception et d'acceptation, une main sur la poitrine, l'autre ouverte et la paume tournée vers Eliézer. Elle esquisse ainsi les mêmes gestes que la Vierge dans les scènes d'Annonciation : cet épisode préfigure de fait, dans la tradition de l'Eglise, l'annonce de la naissance du Christ.
Le classicisme de la composition évoque la sphère française de la première moitié du XVIIIe siècle. Une certaine sécheresse d'exécution comme le format en lunette laissent penser qu'il s'agit d'une copie d'un tableau. La feuille est peut-être passée dans une collection anglaise avant que Babinet n'en fasse l'acquisition : la mention manuscrite "Rebekah", au verso, dans la forme anglophone du prénom, a peut-être été portée par un ancien collectionneur.