Fille d'un médecin dacquois, son enfance marquée par des séjours dans la villa familiale sur le port de Capbreton, et par sa famille maternelle, originaire d’Oloron-Sainte-Marie, tout aussi attachée aux traditions rustiques.
A 14 ans Suzanne Labatut monte à Paris avec sa mère, afin de se former au dessin et à la peinture à l’Académie Jullian, auprès du Toulousain Paul Gervais, célèbre alors pour ses décors du Capitole.
En 1907, âgée de 18 ans, Suzanne est admise aux Beaux-arts de Paris. La formation classique qu’elle reçoit complète l’apprentissage précédant.
Elle obtient une première médaille d’esquisses et participe au concours pour le Prix de Rome.
Bientôt grâce à l’obtention d’une bourse de voyage, Suzanne part visiter l’Italie, ses places, ses cloîtres.
Cette formation académique, classique, elle la revendique, et expose avec succès au Salon des Artistes français ; deux de ses œuvres sont achetées par les musées de Pau et Nevers.
Suzanne Labatut vit à Paris une douzaine d’années. Elle expose à la capitale, à Bordeaux, connaît ses premiers succès, mais en 1924 la vie parisienne ne l’inspire plus : elle décide de se rapprocher de sa famille, rentre dans les Landes et s’installe à Hossegor. Elle demande à l’architecte Jean Prunetti de concevoir pour elle une villa au bord du lac : ce sera la villa « Lou Brouch », dans laquelle Suzanne mène une vie simple, entre son jardin sauvage et ses tableaux.
En 1926 elle expose au musée basque de Bayonne avec Sourgen et Veyrin : c’est une révélation pour la presse locale.
L’année suivante, ses toiles sont présentées au pavillon des Beaux-arts de Benjamin Gomez, à la quinzaine régionaliste d’Hossegor.
Femme délicieuse, au rire cristallin, elle devient rapidement une figure notable d’Hossegor.
Marchand pieds nus dans son jardin, indifférente au jugement d’autrui, sportive accomplie (natation, navigation, vélo...), elle s’investit complètement dans la vie locale, adhère aux Amis du Lac d’Hossegor, « Société de Protection des Paysages landais », qui organise des concours de poésies à la gloire des Landes et milite pour la protection de la forêt, menacée par la pression immobilière autour du lac.
En 1930 elle fonde la Société des artistes landais, peint des décors pour les villa privées et pour des établissements publics, tel le Sporting-Casino d’Hossegor, en 1931.
Elle fait partie de cercles littéraires et artistiques de la station, auprès de Maxime Leroy, David Chabas, Charles Despiau, Maurice Martin, Hervé Lauwick... participe activement aux fêtes régionalistes organisées avec Rosny Jeune, Serge Barranx, Pierre Benoit, Charles Derennes, Maurice Martin, Germaine Delbousquet, Jean Rameau... sa famille d’esprit.
Elle réalise une multitude de dessins et toiles, sa production embrassant tous les registres : portraits de gens du pays et d’enfants, paysages, natures mortes, scènes landaises et marocaines, décoration monumentale, illustrations...
Ancrée dans le mouvement régionaliste de l'entre-deux-guerres, Suzanne Labatut, contemporaine de Jean-Roger Sourgen, est « l'autre » peintre d'Hossegor et des Landes. Ses travaux témoignent d'une attention sincère à son sujet, figure ou paysage, toujours sous-tendue par l'exaltation du terroir landais. Ses portraits cherchent le mystère des âmes : savants et tendres, ils sont empreints d’un classicisme revisité par l’impressionnisme, en contact avec le réel. Femme indépendante mais soumise face à ce qu’elle peint, Suzanne Labatut est attentive au modèle, afin de capter et rendre la mobilité de la vie, le charme et la candeur des fillettes, résumés dans un regard, un sourire.
En 1932, son implication dans la défense des mœurs régionalistes, lui vaut d’être portée à la présidence de la Société des Artistes Landais.
En 1934 elle illustre une nouvelle édition du « triptyque » de Maurice Martin, participe au congrès des écrivains d’Aquitaine, expose.
En 1937 c’est elle que l’on désigne pour la préparation de la salle consacrée aux Landes dans le Pavillon Guyenne et Gascogne de l’Exposition universelle de Paris. Elle y signe deux panneaux décoratifs. Sa notoriété s’affirme encore.
Chrétienne, d’une ferveur discrète, elle réalise dans les dernières années de sa vie, le Chemin de Croix qui orne la chapelle de Labenne, et une crèche landaise à l’église de la Trinité à Hossegor.
Éloignée des tourments de Lizal comme des nostalgies de Sourgen, Suzanne Labatut a su allier une sensibilité toute féminine dans ses portraits, et un esprit synthétique et viril dans ses paysages.
Un pont lui est dédié entre Hosssegor et Capbreton, au-dessus de la rivière du Bourret.