Très tôt, Victor Largeau est attiré par les grands espaces et fait plusieurs séjours au Sahara algérien de 1874 à 1879. Il établit les premières routes pour les caravanes françaises de Toggourt à Ghadamès et à in Salah vers le Hoggart mystérieux. Sur ces régions quasiment inexplorées avant lui il publia cinquante ouvrages qui contiennent quantité de renseignements politiques, économiques, ethnographiques et linguistiques qui serviront plus tard à François-Henry Laperrine et Charles de Foucauld. Dans un souci de pénétration pacifique et commerciale, il souhaitait obtenir que les caravanes venant du Soudan, après avoir fait étape à In Salah, Ghat ou Ghadamès se dirigent vers l'Algérie et non vers Tripoli.
C'était en 1874, j'avais formé le projet d'explorer le Sahara au double point de vue commercial et scientifique. Je voulais d'abord essayer d'attirer vers notre colonie les caravanes du Soudan qui, depuis la conquête, se rendent au Maroc et dans la tripolitaine, en évitant soigneusement l'Algérie. Je voulais ensuite, tout en fournissant des preuves palpables de la richesse du Soudan, attirer l'attention sur cette contrée, et enfin rechercher les moyens d'établir, à travers le Grand-Désert, une voie ferrée qui, reliant l'Algérie au Niger, nous mettrait à quelques jours du " Pays des Noirs " et nous donnerait le monopole de son commerce. Un projet aussi vaste était bien téméraire car, à cette époque, on enseignait dans les écoles que le Sahara est un désert de sables mouvants, sans eau, inhabitable, inhabité, si ce n'est par les bêtes fauves, précise Victor Largeau dans un article qu'il signe dans la revue Le Tour du monde en 1881.
De retour à Niort en 1879, il occupe de 1879 à 1886 un poste d'inspecteur départemental de l'assistance publique créé pour lui pas le Conseil Général des Deux-Sèvres.
Mais l'appel des pays lointains est trop fort et en 1886 il s'engage dans l'administration coloniale qui l'envoie en Afrique noire. En 1887 il est au Haut-Sénégal et en Guinée ; en 1888/1889 il fait un intermède dans le Pacifique, aux Îles Tuamotu et à Tahiti. En 1891, il est chargé d'administrer la difficile région de l'Oubangui tout juste ouvert à la pénétration française. En 1896 il est à Ndjolé sur l'Ogooué, mais en 1897 épuisé par le travail et miné par les maladies tropicales il rentre en France et meurt le 17 mars.
Dans ses ouvrages sur le Sahara, dans les articles qu'il a publiés dans les journaux et les revues géographiques, dans les lettres adressées à sa famille, Victor Largeau se révèle un observateur attentif et respectueux des moeurs et des croyances des peuples qu'il rencontre Il faut bien comprendre que les noirs habitants du Soudan (ou du Gabon) ont leur génie propre et que leur civilisation ne sera jamais comme la nôtre : c'est ce qu'on apprendra difficilement et l'évolution de ces peuples en sera d'autant plus retardée. Nous manquons de tact. Écrivait-il à son fils Charles en 1887.
Linguiste éminent, il s'est particulièrement intéressé à la langue et aux coutumes des Fang du Gabon. Correspondant de plusieurs sociétés savantes françaises et étrangères, Victor Largeau était membre de la Société de Statistiques, Sciences, Lettres et Arts du département des Deux-Sèvres fondée en 1836. En 1875, il offrit une collection d'échantillons minéralogiques et un lot d'armes et d'objets d'artisanat Touareg et en 1897, après sa mort, sa famille céda la collection qu'il avait constituée dans les différents pays d'Afrique où il avait été en poste.