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Manquent les planches originales nos 1, 2, 3, 9, 12, 16, 32, 43, 100, 131.

Un autre ensemble remarquable [---] est constitué par les planches des épisodes successifs de Moustache et Trottinette. En quantité, ils représentent plus de la moitié des pièces [---] et couvrent la totalité des épisodes dessinés par Calvo pour l'hebdomadaire belge Femmes d'aujourd'hui. De 1952 à 1958, l'auteur a fourni une ou deux planches chaque semaine pour " la page des enfants " de l'hebdomadaire. Moustache et Trottinette est si l'on veut l'oeuvre de la pleine maturité : assuré d'une publication régulière, Calvo met en place un univers qu'il maîtrise entièrement. Les différents épisodes visitent les thèmes et les périodes historiques qu'il aime : le Moyen Âge (tout le premier épisode, d'une remarquable longueur), la période napoléonienne (Kouglofbourg), le Far West et, bien sûr tous les épisodes plus courts (Le Brigand de la Mare-Moussue, Moustache détective…) où s'affirme son amour des forêts et des sous-bois. Moustache et Trottinette est de ce point de vue un festival de scènes sylvestres dont les avant-plans sont occupés par des racines au dessin complexe, véritables entrelacs de traits et de hachures… L'effet n'est pas sans rappeler certaines des images de Gustave Doré dans Le Petit Chaperon rouge, quand la forêt est à la fois accueillante et vaguement inquiétante. Dans l'ensemble, Moustache et Trottinette frappe par sa foncière gentillesse et sa constante truculence. On voit que Calvo s'est conformé à la commande de son éditeur et a fourni des histoires " gentilles " pour les enfants de l'époque, et n'a sans doute pas eu à forcer sa nature profonde. Mais cette gentillesse n'est jamais mièvre. Réalisée " au fil de la plume ", la série compte des épisodes de longueur variable, comme si Calvo suivait librement son inspiration. Cette liberté se ressent aussi dans le traitement graphique : le découpage s'adapte aux besoins du récit. " Gaufrier " répétitif de cases semblables dans certaines pages, ce sage ordonnancement est ailleurs chamboulé quand l'action l'exige : ainsi dans Moustache et Trottinette au Far West, l'irruption inattendue d'une locomotive qui sème la panique dans une petite ville se traduit sur la page par le trajet en diagonale de l'engin, qui " éventre " littéralement la disposition habituelle des cases et des bandes. Ailleurs, l'arrivée d'un groupe de personnages dans un château médiéval est l'occasion d'un panoramique traité en vue plongeante dont l'effet suscite, au sens premier du terme, le vertige. Série qui clôt l'oeuvre de Calvo, Moustache et Trottinette en est en quelque sorte la synthèse. Bande dessinée à la fois animalière (en plus de ses deux héros, un chien et un chat, Calvo fait intervenir au fil des épisodes tout un bestiaire d'éléphant, renard, chevaux en quantité, chiens, oiseaux, lapins…), mais aussi " mécanique " (on a parlé de la locomotive du Far West, il faut y ajouter plusieurs guimbardes à quatre roues, quantité de vélos… le souvenir de Rosalie est proche). On ne reviendra pas sur la dimension champêtre de l'ensemble, mais on signalera encore des ambiances urbaines d'une belle densité. De ce point de vue, le dernier épisode, interrompu par la mort de Calvo, promettait beaucoup : Trottinette se rendait à Paris pour retrouver son ami disparu.