Jungle Book : Decadence Degenerated

- 2012.2.2
Kurtzman Harvey
Il s'agit de la planche originale correspondant à la page 83 de "Jungle Book". Le dessin est réalisé à l'encre de Chine, lavis gris et gouache blanche sur papier. Un film celluloïd, lui-même recouvert d'un film rouge inactinique collé, recouvre la planche et est maintenu dans sa partie supérieure par des adhésifs.
Il y a 2 repères d'imprimeurs (hirondelles) : 1 dans la partie droite de la planche (en bordure extérieure) et une en bordure extérieure de la partie gauche de la planche.
Au dos de la planche est collée une étiquette (bon de commande à un imprimeur ?) sur laquelle on peut lire :" Order [---] Lanman engrav [...]". Le nom du client est "Ballantine Books". Voir la fiche inv. n°2012.2.1 correspondant à la page n°82 de "Jungle Book".
On retrouve le cow-boy au moment même où il réalise que la femme indienne est une sculpture de bois et non une personne. De dépit, il la jette par terre. En arrière-plan, deux hommes se soutiennent mutuellement, non loin d'un cheval. L'un des hommes, Mister Dollin, est armé et vise le cow-boy sacrilège qui a cassé "the indian code". Peu impressionné, ce dernier rétorque à l'homme qui le tient en joue qu'il n'aurait pas cette attitude envers lui sans la présence de son arme. M. Dollin demande alors à son acolyte, Lester, de rendre son arme à Ringding, le cow-boy. Sur ce, Lester demande alors à M. Dollin de le laisser tirer sur le vandale le premier. Ringding épilogue alors en se moquant du fair-play de ces américains décadents.

Né en 1924 à Manhattan, Harvey Kurtzman est considéré comme l'un des créateurs les plus importants de la bande dessinée américaine. Dessinateur, scénariste, responsable dans les années 1950 et 1960 de plusieurs revues ayant profondément renouvelé l'humour américain, il reste relativement méconnu du grand public, alors que sa réputation est immense chez tous les dessinateurs américains contemporains. Il a influencé des auteurs français aussi remarquables que Morris, René Goscinny (ils furent amis), Georges Wolinski, Marcel Gotlib, René Pétillon…
Kurtzman a débuté professionnellement dans les années 50, en dessinant des pages d'humour pour les comic books de Marvel et en s'essayant comme scénariste à tous les genres alors en vogue. Mais c'est son entrée dans le staff d'EC Comics (éditeurs de comic books de science-fiction, de guerre et d'horreur) qui lui permet d'affirmer son talent. Scénariste, pour Frontline Combat et Two-Fisted Tales, il fournit à ses dessinateurs des histoires entièrement dialoguées et découpées, d'une stupéfiante intelligence narrative. Les scénarios, loin des habituels récits revanchards et manichéens, décrivent la guerre comme une expérience qui broie des hommes dépassés par ce qu'ils affrontent.
C'est le lancement de Mad en 1952 qui va le faire entrer dans l'histoire de la culture populaire américaine. Inventeur du concept, scénariste de toutes les histoires qui paraissent dans les premiers numéros, il est le premier à user de la parodie comme d'une arme de critique sociale. S'attaquant d'abord aux classiques de la bande dessinée américaine, il moque ensuite l'American way of life qui triomphe alors dans l'Amérique des années 1950. Le succès de la revue, servie par des dessinateurs exceptionnels (Jack Davis, Bill Elder, Wallace Wood, John Severin), sera foudroyant. En conflit avec son éditeur, Kurtzman quitte Mad en 1956. Il crée des titres (Trump, Humbug) qui ne rencontrent pas le succès, malgré des contenus d'une exceptionnelle qualité. A partir de 1960, il anime Help !, revue d'articles, de bande dessinée et de romans photos comiques qui permettront à Robert Crumb, Woody Allen, John Cleese et Terry Gilliam de faire leurs premiers pas. La revue cesse de paraître en 1965. Kurtzman se lance alors avec Bill Elder et une pléiade de dessinateurs d'appoint, dans la création de Little Annie Fanny, pour Playboy. Bénéficiant d'énormes moyens de production, Little Annie Fanny (parodie d'un classique larmoyant et réactionnaire des années 1930), est à la fois une bande dessinée sexy et une mise en boîte délirante de l'Amérique des années 1960 à 1980. Par ailleurs collaborateur pour la télévision, scénariste et enseignant, Harvey Kurtzman ressent au cours des années 1980 les premiers effets de la maladie de Parkinson qui va handicaper la fin de sa vie. Il meurt en 1993, d'un cancer du foie.
Le Jungle Book d'Harvey Kurtzman est l'une des rares oeuvres entièrement de sa main. Réalisé en 1959 pour la maison Ballantine, il est aujourd'hui considéré comme l'un des premiers " romans graphiques " de la production américaine. Il ne s'agit pas pour Kurtzman de revisiter le livre de Rudyard Kipling, mais de se moquer une fois de plus du mode de vie américain. Divisé en quatre chapitres indépendants, le Jungle Book moque les feuilletons télévisuels, le monde de la presse et des médias, et les moeurs des petites villes du coeur des Etats-Unis. Il parvient à rendre hilarante une critique acerbe de son pays, et démontre une maîtrise impressionnante de la narration BD. Usant d'un trait enlevé et d'un lavis d'une parfaite lisibilité, il est d'une modernité mal perçue à l'époque, mais qui marque profondément les jeunes créateurs. Robert Crumb et Art Spiegelman, les deux figures marquantes de la bande dessinée US depuis les années 1960, tiennent ce livre en très haute estime (Spiegelman en parle comme d'un " texte sacré ").

Les deux pages (voir autre fiche n° inv. 2012.2.1) que le musée soumet à la Commission proviennent de l'épisode intitulé Decadence Degenerated. Sous couvert de raconter un fait-divers qui secoue la population d'une petite bourgade au coeur des USA, Kurtzman se livre à une attaque en règle de la bien-pensance américaine, engoncée dans ses convenances, son hypocrisie et ses vices cachés. Cet épisode est sans doute le plus drôle, mais aussi le plus noir du Jungle Book. Le découpage en quatre cases donne un rythme rapide à la séquence. On admirera le placement des bulles, qui non seulement contiennent des dialogues qui " sonnent " bien, mais guident l'oeil du lecteur dans sa découverte de la page. Les postures des personnages, traitées avec ce qu'il faut d'exagération, frappent par leur justesse.

9, place Gambetta (cœur de ville)

17310 Saint-Pierre-d’Oléron

Ouvert - dimanche : 14h - 18h

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Caractéristiques

Numéro d’inventaire
2012.2.2
Domaine
Arts graphiques - bande dessinée
Dénomination
dessin - planche originale
Titre

Jungle Book : Decadence Degenerated

Auteur, exécutant
Kurtzman Harvey
Date d'exécution
1959
Siècle ou millénaire
3e quart 20e siècle
Matière
papier - celluloïde - matière plastique
Technique
encre de Chine - lavis gris - gouache blanche
Dimensions et formes
H. 23,5 ; l. 13,5
Type d’inscription
inscription - numéro - inscription - inscription
Transcription des inscriptions
D338K (b.g., encre de Chine, inscrit sur adhésif, manuscrit)
83 (b.m., imprimé à l'encre de Chine noire sur un adhésif blanc)
HT | [---] | .31| 1.42 (m.d., graphite, manuscrit)
p9 83 mask OL | [---] 100% (b.d., graphite sur scotch papier collé sur film inactinique rouge, manuscrit)
Sujet représenté
Etats-Unis - cow-boy - femme - sculpture - arme à feu
Localisation de l'objet
musée de la bande dessinée (Angoulême, bât.)
Propriétaire, type de propriété
Angoulême, propriété de la commune
Mode d'acquisition par le musée, date d'acquisition
achat avec le concours du FRAM, 04.10.2011
Service gestionnaire
la Cité internationale de la bande dessinée et de l'image
Précisions administratives
Avis favorable de la commission d'acquisition du 07 juin 2012. Œuvre dévolue à la ville d'Angoulême.
Ancienne appartenance
Galerie Laqua - avant 04.10.2011

Mentions légales

Mention légale
© Alienor.org, musée de la bande dessinée, CIBDI

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