Précisions sur l'utilisation
La figure peut être replacée dans la partie du programme de la Nuit des Temps ou l'Elixir de rajeunissement consacrée à cette période, intitulée " Mon Dieu, Mon Roy, Ma Dame ", située à l'acte 1, et comprise entre les tableaux XVI à XX. Le texte de la pièce raconte un épisode de combat dans lequel devait prendre place le guerrier n° 13839.2 :
" C'est la guerre. En avant le ban et l'arrière ban ! Le sire châtelain enfourche son destrier et le trouvère Cambrenaz, laissant sa mandoline est armé par les dames. L'armée ennemie s'avance, hérissée de piques. Les chevaliers baissent la lance et chargent ; au fond brûlent les villes mises à sac par l'envahisseur. Pour ses débuts, le trouvère Cambrenaz n'a pas de chance. Il est aplati et comme passé au laminoir sous les coups de masses d'armes. "
Les détails du passage ne sont pas assez explicites et ne permettent pas d'identifier le personnage avec certitude. Il peut très bien s'agir du héros comme d'un quelconque soldat. Le manuscrit développe aussi ce même sujet au chapitre XVIII appelé " Souvenirs un peu confus d'existences bien agitées " :
" Le paysage change, la chanson du trouvère s'éteint dans un fracas d'armes. Et voilà que Florimond, une autre Florimond caracole, fièrement campé sur un grand cheval bardé de fer qu'il serre de ses genoux nerveux et manoeuvre d'une poigne solide. Il est en adoubement complet de chevalier faisant service loyal à son suzerain, haubert de mailles sous un corselet de fer, spallières, brassards et cuissards, grèves et solerets de fer, le heaume sur la tête et la lance sur la cuisse.
En ligne, à côté de lui galopent en trombe d'autres figures de fer et d'acier. Poussière, cris de guerre, énorme fracas que déchirent des appels de trompette. Chevauchées et charges pendant de longues heures. Florimond se rappelle une sensation de soif terrible. La gorge lui cuit encore quand il y pense. Tout à coup il est par terre, écroulé avec son cheval les quatre fers en l'air, et des hommes de pied, en harnois de fer ou gambisons de cuir, avec des marteaux d'armes, des plommées, des picois, des godendacs, cognent à tour de bras sur lui, le laminent et l'écrasent dans son armure! Pauvre Florimond aplati qui semble définitivement trépassé !
D'après ce récit, Cambrenaz est équipé d'une lance et revêtu d'une cuirasse ce qui correspond à une armure de chevalier. A côté de lui se trouvent des cavaliers mais aussi des ennemis constitués d'" hommes de pieds ". Ils sont séparés en deux catégories, ceux qui portent le " harnois de fer " et ceux qui ont des " gambisons de cuir ". Le harnois désigne l'équipement militaire d'un soldat du Moyen-âge, composé d'une armure complète avec mailles et plaques de fer, alors que le gambison est un vêtement de guerre confectionné dans de la peau ou de l'étoffe. Le tissu est généralement couvert d'un haubert ou cotte de mailles et renforcé de plates constituées de lamelles de fer battu.
En comparant cette description avec la silhouette et des illustrations d'Alfred Robida, il parait probable que la figure d'ombre appartienne à cette catégorie des hommes de pieds portant le gambison. Par-dessus cet habit, il doit avoir une cotte de mailles ainsi qu'un surcot, tissu de protection, dont le bord inférieur est découpé en lamelles. A sa taille se trouve une ceinture qui est munie de crochets de fixation pour suspendre deux épées, une première à grande lame sur sa gauche et une seconde plus courte sur sa droite. Il porte aussi des pièces d'armures qui servent de protections pour la tête et les membres. Enfin, un bouclier triangulaire, appelé écu, est fixé sur son épaule gauche. Il est marqué d'une figure animale qui n'est pas sans rappeler le lion héraldique de la ville de Compiègne, dont Robida est originaire.
Le guerrier n'est pas équipé de " plommées ", " picois " ou " godendacs ", comme cela est écrit dans le texte. Il ne possède pas d'arme de poing. Il est au contraire en train d'actionner une manivelle reliée à une sorte de caisse rectangulaire, et effectue probablement un mouvement rotatif. Il est difficile d'identifier cette action. M. Haussadis et M. Sage du Musée de l'Armée ont émis l'hypothèse d'une baratte à polir les métaux. Il s'agit d'un coffre dans lequel se trouve du sable. Tous les éléments d'harnachement en acier y sont déposés, puis la manivelle est tournée pour entrainer la boite en bois et mélanger le sable qui va venir nettoyer les métaux. Cette interprétation est peut-être juste mais aucun passage du texte ne vient la confirmer. D'après le manuscrit, il pourrait aussi s'agir d'un laminoir au sens propre du terme. Mais là encore, lorsque l'auteur dit que Cambrenaz est laminé, il faut peut-être y voir une figure de style.