L'attribution de cette composition à la sanguine, à la plume et au lavis d'encre brune, à Ventura Salimbeni, a été confirmée par Pierre Rosenberg, alors que Philip Pouncey, en 1969, inclinait plutôt vers Alessandro Casolani dit della Torre.
Une composition très proche, avec des saints différents, est conservée à l'Albertina de Vienne (V. Birke, J. Kertesz, Die italianischen Zeichnungen der Albertina, Band I, 1992, n° 689). Salimbeni se serait inspiré de "l'Extase de sainte Catherine" du Sodoma. On peut également rapprocher cette feuille d'un dessin du Louvre (INV 1994) et d'un autre conservé à Windsor Castle (Windsor Castle, Cat. Italian Drawings XV/XVI, n° 882).
Ce dessin, certainement lié à un tableau de retable, représente la Vierge Marie et l'Enfant apparaissant sur un nuage porté par des angelots. La Vierge est couronnée, et sa tête est entourée de douze étoiles, d'après la vision de saint Jean dans l'Apocalypse. Le dessinateur a utilisé la sanguine pour évoquer, derrière elle, le choeur céleste des anges. Ce changement de technique différencie l'espace divin de l'espace terrestre, et évoque une aura mystérieuse autour de l'apparition. Dans la partie inférieure de la composition, on reconnaît à droite saint Michel, portant la balance et terrassant de son épée le dragon, un diable aux ailes de chauve-souris. Derrière lui, une sainte en habit de religieuse qui tient une tige fleurie, certainement sainte Catherine de Sienne, porte la main à son coeur dans une attitude de dévotion. A gauche, en adoration, se tiennent saint Antoine, portant le tau orné d'une clochette, et un autre saint portant une croix de procession, peut-être saint Philippe.
Tous les regards, à l'exception de celui de saint Michel, sont levés vers la Vierge et le Christ, qui en retour baissent les yeux vers les fidèles.
La composition alterne des grandes plages de lavis sombre et des espaces laissés en réserve. Ainsi, le groupe composé de la Vierge, de l'Enfant et des anges forme une pyramide sur fond clair. Cette moitié supérieure du dessin répond à la partie basse, où les saints adorateurs encadrent une zone plus claire en forme de pyramide inversée. Il y a donc un rapport dialectique entre l'espace divin et l'espace terrestre. Les saints sont néanmoins séparés du monde des fidèles devant l'autel par une sorte de socle, comme s'il s'agissait d'une transition entre le monde réel et le monde représenté.
Le retable montre bien ici sa fonction théologique, en lien avec les réformes tridentines de la deuxième moitié du XVIe siècle. Le culte des saints, qui connaît un renouveau considérable, les présente comme des intercesseurs privilégiés. L'image devient une porte ouverte sur le sacré, voulant mettre le fidèle en présence de Dieu, et insistant sur l'importance de l'Église comme intermédiaire avec le divin.