Définie par la figuration de scènes anecdotiques ou familières, la peinture de genre connaît son apogée au 17e siècle, en particulier dans les pays d’Europe du Nord ; leur religion, le protestantisme, refuse en effet les représentations religieuses dans les lieux de culte et favorise ainsi les sujets profanes. Caractéristique de ce genre, ce tableau représente une scène se déroulant dans une taverne ou dans un intérieur populaire dont les détails sont rendus avec précision. Au premier plan, un halo artificiel de lumière éclaire trois hommes -occupés à fumer, à boire et à jouer aux cartes autour d'une table- ainsi qu'un couple debout et un chien allongé sur le sol. D'autres personnages masculins, parmi lesquels figure un enfant, sont placés dans l’obscurité, près d’une cheminée dont le foyer est allumé.

Comme souvent dans ce type de peintures, les détails abondent et certains peuvent être symboliques. Il est par exemple délicat de dire si la femme, la seule du tableau, reçoit de manière favorable ou non les avances de l’homme qui l’enlace. Néanmoins, au fond de la salle, un lit défait pourrait donner un indice. Le petit chien, motif récurrent des scènes de genre flamandes dès le 15e siècle, est un symbole de fidélité conjugale ; or, ici, il regarde dans la direction opposée du couple. Ces éléments pourraient donc suggérer un adultère. Toutefois, la chandelle près de l’homme qui enlace la femme pourrait aussi adresser un message contraire : si le feu est un symbole de la sexualité, la bougie, quoique dressée, est ici éteinte.

Cette peinture a été attribuée à Adriaen Van Ostade, artiste spécialisé dans les intérieurs de taverne et autres scènes de genre.

Sans doute inspiré par Rembrandt, le recours au clair-obscur est une des caractéristiques du travail de Van Ostade de même que l’emploi d’une palette limitée, principalement composée ici de tons de bruns et de gris.

Ce peintre avait un goût prononcé pour le monde paysan néerlandais qu’il a représenté dans ses joies et ses vices, suivant l’héritage des fêtes populaires de Brueghel l’Ancien. Certaines œuvres de Van Ostade se caractérisent ainsi par un traitement caricatural et grimaçant des personnages -dont les traits et les vêtements sont marqués par l’atmosphère humide et froide des environs d’Haarlem- et par un certain humour. Dans ce tableau, l’ivresse manifeste de plusieurs personnages accentue le caractère grotesque de leurs visages tandis que quelques éléments discrets se révèlent comiques voire triviaux. L’homme de dos qui apparaît dans l’ombre au second plan est par exemple dans une posture qui pourrait indiquer qu’il est en train de se soulager.

Récupérée à la fin de la Seconde Guerre mondiale, cette œuvre (numéro d’inventaire provisoire : MNR473) a été attribuée au musée du Louvre en 1950 puis déposée au Musée de Brive par arrêté du Ministère de l’Éducation Nationale le 11 août 1952. Sa provenance n’est pas établie. En cas de spoliation, elle sera restituée à ses légitimes propriétaires.

Voici son parcours, référencé sur le site Rose-Valland : « Le tableau a appartenu à la famille Teding van Berkhout. Le tableau est vendu à Hans Herbst par M. Vincent, Paris, pour 900 000 F le 20 juillet 1943 et acheté 180 000 RM au Dorotheum le 15 février 1944 par le musée de Linz. Il est enregistré au Central Collecting Point de Munich sous le n° 4911. Le tableau est attribué au musée du Louvre par l'Office des Biens et Intérêts Privés en 1950. Puis il est déposé au musée Labenche de Brive en 1952 ».

Lien vers le site Rose-Valland Musées Nationaux Récupération : https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/mnr/MNR00473?base=%5B%22R%C3%A9cup%C3%A9ration%20artistique%20%28MNR%20Rose-Valland%29%22%5D&image=%5B%22oui%22%5D&mainSearch=%22mus%C3%A9e%20labenche%20%22&last_view=%22mosaic%22&idQuery=%2225e23fa-8fb-28f-6c16-24f72e4de43%22